Dimanche – 12 h 45 – Assis à table, je
contemple mon assiette de blanquette. C’est pas comme
si elle était dégueulasse, cette blanquette,
mais j’arrive pas à l’avaler. Les autres
personnes présentes me confirment même, par leur
silence relatif, bruits de mastication et de déglutition,
que cette blanquette est délicieuse. Quelqu’un
me propose un verre de vin, offre que je décline, mon
foie ayant été suffisamment sollicité
cette nuit. Et c’est sur cette pensée que ma
petite sœur entre dans la cuisine, et se joint à
la table familiale.
« Lui, il était complètement bourré
hier ! », s’écrit-elle en me montrant du
doigt.
C’est parti, ma mère me demande si je n’ai
pas fait trop honte à la famille, ma copine assure
que si, j’ai dû être pitoyable. Seul le
chien s’en fout, et continue à mendier des bouts
de bidoche…
Effectivement, la veille, j’ai fait la fête ;
une bonne grosse fête, resto entre potes, bar entre
potes, boîte entre potes. Le genre de fête dont
on connaît l’issue, on a bien prévu de
tout faire à pied. On commence par le resto, et l’apéro.
On commande les plats et le vin, on prévoit large tout
en sachant que &cced;a ne sera pas assez large. Deux options
se sont présentées à la carte, et la
table se voit divisée en deux groupes : les raclettes
et les fondues bourguignonnes. Alors on se déplace,
on réagence les couverts, la disposition des verres,
on rassemble et on organise l’espace. Il y aura du contact,
ça sera chaleureux. On déblatère des
conneries, on se grille une énième clope, on
boit, on boit, on bouffe et on règle. Les poches pleines
de bonbons, on prend la direction d’un pub enfumé.
La soirée se poursuit donc, les conversations évoluent,
de la géopolitique et la philosophie de comptoir, on
en arrive aux nanas, à ce qui se dit durant leurs soirées.
On spécule, on s’imagine des choses que l’on
a vu dans Hollywood Night ou l’érotique de la
6. Des photos traînent sur la table, au milieu des pintes
et des cendriers, les photos d’un jour de l’an.
On feuillette, et on tombe sur une photo de chibre, un beau
gros plan qui a dû faire sourire le photographe. On
commente, les filles font semblant d’être outrées,
les garçons font semblant d’être mieux
montés. Une fermeture de bar plus tard, nous voila
attablés -Il y a plein de tables dans ce récit-
en discothèque, on retrouve des têtes connues,
dont une petite sœur, on serre des mains, on gueule des
bonsoirs, et on promet à tout plein de gens, que l’on
a perdu de vue depuis des lustres, qu’il serait génial
qu’on se retrouve en plein jour, sobre, pour se raconter
nos vies. Alors on prend des numéros de téléphone,
dont on ne se servira pas, et on le sait bien. Mais c’est
une règle, d’être sympa, de faire semblant.
On paye un verre à une fille intéressée,
on lui raconte des choses pas intéressantes, elle s’en
fout, et nous pareil. On fait encore un peu plus semblant.
Pour être polie, ou peut être en échange
du verre, la fille accepte l’invitation à danser,
on fait le beau jusqu’à la piste, et on se rend
compte que la fille papote avec un autre mec. Blasé,
pour pas avoir l’air trop con, on fait semblant de s’amuser,
semblant de savoir danser. On termine quand même par
se faire une place au sein d’un cercle, tout le monde
regarde consciencieusement ses pieds bouger sans écraser
ceux du voisin, on remue en –presque- rythme, et on
finit par prendre la fuite, avec les arrivées synchronisées
d’un son techno-rap pourrave sur les platines du DJ
et de tout ce que la boîte compte comme crétins
friands de Hit Machine sur le dancefloor. On retrouve ses
potes, affalés dans les canapés, « - ça
va ? - ouais, et toi ? - pas mal - bon… S’en
suit un « - T’as vu cette nana ? - Ouais, elle
est pas mal - Je me la ferai bien». Et comme rien de
bien joli ne peut en sortir, nos bouches accueillent encore
un verre ou deux. Ca occupe…
A ce stade, on ne fait plus du tout semblant d’être
con. On se retrouve sur la piste de danse, où des kilos
de viande sautillent. Et si on montrait notre cul ? On se
risque alors à défaire notre braguette. Bien
essayé, mais c’était sans compter sur
la vigilance de la petite sœur qu’on avait presque
oublié. Elle nous attrape et nous hurle « Ca
va pas non, pas ici ! ».
Et pourtant… En montrant notre cul, on aurait fait preuve
d’une sincérité étonnante, on aurait
pas fait semblant, on aurait laissé libre cours à
nos instincts primaires. On se serait soulagé de cette
rétention de « va te faire foutre ». Voir
une bite en photo, voir des types à poil au ciné,
ça fait rire, on trouve ça bien même,
on paye pour Michaël Youn. Et il faudrait laisser le
privilège de s’exhiber aux chippendales, montrer
son cul serait l’apanage de Robert Carlyle ?
Montrons notre cul pour dire non, je n’ai pas envie
de faire partie de ces gens qui restent pépères,
à rigoler des blagues, aussi connes soient elles, des
autres, alors que je peux faire pareil. Je revendique mon
appartenance au genre Macaque.
Donc non, je n’ai pas été, en définitive,
pitoyable. Mais je l’ai quand même mauvaise, devant
ma blanquette. Ecrire ce texte, c’est une façon
de montrer mon cul, a posteriori. Parce que je ne me fais
pas à l’idée d’avoir constamment
en tête les règles de savoir-vivre, je ne supporte
pas d’avoir à être poli avec des gens qui
m’emmerdent, je préfère faire le pitre.
Montrons nous nos fesses au lieu de faussement s’intéresser
à nos vies. Des gens qui s’exhibent dès
leur première rencontre partent forcément sur
de bonnes bases, saines ; ils ne se racontent aucun mensonge,
ils déconnent.
En rédigeant ce texte, je me rends compte qu’il
ne me reste que les clubs naturistes, où je pourrai
me balader à poil, en toute liberté. Mais si,
dans ce club tout nu, je tombe sur quelqu’un qui fait
semblant de s’intéresser à mon cul pour
mieux me connaître, que dois-je lui montrer ?
Chers amis,
Je m'aperçois, à travers de nombreuses prises de positions, que
la franchise est de rigueur sur le salon. En effet, tandis que l'un ose crier
haut et fort qu'il n'aime pas l'eau tiède sans se soucier des regards hostiles
que pourrait susciter une telle exclamation, l'autre affiche clairement le plaisir
qu'il éprouve à éxhiber son sale derche en public !
Je dis BRAVO! A l'heure où le monde est régi par l'hypocrisie et
l'apparence, la société a besoin de penseurs engagés, de
réformateurs, de révolutionnaires !
Cependant, et vous allez dire qu'il ne faut pas aller trop loin non plus, je prétends,
MOI, Le Baron, et je nai pas peur de le dire, que montrer son cul c'est pas assez
! Oui messieurs, je ne crains ni le cachot ni la fessée ! Le cul c'est
trop peu et si l'on veut réellement changer les choses dans cette société
pourrie il faut montrer sa BITE !! N'en déplaise au bourgeois et aux cathos,
aux gauchos et au fachos, aux hétéros et aux homos, l'important
pour révolutionner le monde c'est d'être VRAI à 100%, de faire
preuve d'une totale franchise et d'arrêter de faire semblant. Je le redis
donc tout haut et tout fort C'EST LA BITE QU'IL FAUT MONTRER !!!