Cette citation Freudienne ne révèle son authenticité que
par la pratique même du civisme. En effet, il est difficile de s'apercevoir
à quel point l'homme est vil sans franchir brutalement les barrières
de l'hypocrisie (que certains appellent bienséance) et ainsi taper tout
juste dans ce qu'il lui reste de sincérité. Il me paraît
utile d'apporter une légitimité à ces considérations
et donc de vous relater une expérience personnelle des plus explicites.
Lyon est une grande ville où beaucoup de gens se croisent et se recroisent
sans jamais se parler, sans jamais se rencontrer, s'affronter, sans même
parfois oser se regarder. Je constate même que cette non-communication,
de par sa récurrence, a désormais revêtu une forme coutumière.
Combien préfèrent regarder leurs pieds plutôt que d'interpeller
leur compagnon providentiel d'ascenseur sur le magnifique but marqué
la veille par l'attaquant vedette du Paris Saint-Germain ? Ceux-là sont
à peu près aussi nombreux que les frustrés qui vous klaxonnent
de loin avec un air malgracieux avant de s'enfuir à fond afin d'aller
râler auprès d'autres décontractés du volant, pourtant
peu nombreux. Ces faits même démontrent donc qu'il existe en fait
une certaine forme de communication sociale qui tient toutefois plus de la sauvagerie
que de la civilisation.
J'emprunte régulièrement les trottoirs de ma rue pour aller faire
deux-trois courses et y trouve, par la-même occasion, un intérêt
particulier à observer les hommes et leur comportement. Je dois dire
qu'aujourd'hui mes observations ont été fructueuses puisqu'elles
m'ont permis d'enfanter ce petit article. En effet, alors que je m'en retournais
à mon domicile sans avoir eu la joie de constater quelque attitude extraordinaire
que ce soit, ma surprise fut grande (quoi que toute relative) de tomber nez
à nez avec une jeune dame d'une soixantaine d'années, aux cheveux
aussi blonds que ceux de Catherine DENEUVE, aux apparats aussi luisants que
ceux de Bernadette CHIRAC et au bichon frisé aussi moche et con que celui
de n'importe quel détenteur de bichon frisé ! Non pas qu'il soit
rare de rencontrer ce genre d'énergumène puisqu'ils sont très
nombreux dans les zones de non-communication, cependant, je dois vous préciser
que cette personne, à cet instant, prenait le soin de faire uriner son
putain de clebs contre la carrosserie d'un véhicule stationné
sur le bord de la chaussée... Ne ratant pas une occasion d'engager un
conversation promettant d'être pimentée je lui dis : "Dites-donc
Madame ! Votre chien pisse sur ma voiture !". Celle-ci fit mine de ne rien
entendre. "Madame! Vous faîtes pisser votre chien sur ma bagnole
!" reformulais-je en haussant le ton. La vieille mégère,
frappée par tant d'insolence et alors touchée dans sa vérité
sortit subitement de sa surdité bien accommodante et s'empressa de me
recadrer en me rappelant nos si chères traditions: "Non mais oh!"
me dit-elle avec arrogance, "Il pisse bien sur la mienne et je n'en fais
pas tout un plat !! Vous n'avez qu'à vous garer ailleurs !!" puis elle reprit
son activité et bougonnant.
Devant cette bonne leçon de triste humanité que venait de m'infliger
la vieille au bichon frisé, il ne me restait plus qu'à m'en retourner
d'où je venais, penaud, incompris et désespéré,
répétant dans ma tête les règles de notre belle civilisation :
haine, hypocrisie, fourberie, arrogance et bichons frisés... Chaque civilisation
a les ordures qu'elle mérite...